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Lettre aux Salles

Si j’étais extrémiste, je ferai drastiquement baisser le prix des tickets. Pas plus de 2€ ! Vous empêchez les pauvres d’y accéder ! Choisir entre deux repas ou une place de ciné : la question se pose une fois par mois, pour le blockbuster de l’Europalace… Je suis cinéaste, je n’ai pas les moyens d’aller au cinéma !! De là à inviter ma copine, glurps… Regardez la fête du cinéma, c’est le succès, parce-que ce n’est pas cher ! Les gens sont en demande, mais vous cherchez tellement à vous gaver, que ça va s’effondrer. Collectivement, vous entreprenez d’augmenter la taille des salles, alors qu’il faut faire le contraire ! Une grande salle à moitié vide pourrait faire deux petites salles pleines, avec deux films soutenus. Vos cinémas mégalomanes sont déshumanisés, loin de l’expérience collective retrouvable dans la projection sur des draps de 2m². 

Maintenant, que diriez vous d’une petite partie d’échecs cinématographiques ? Afin de mieux représenter l’ordre des choses, je retire ma reine, car elle représente l’argent. Considérez qu’il faut un an pour déplacer une pièce d’une case.

Pion -> J’avance cinquante courts métrages.
Pion -> Ainsi que quarante projets, tous types.
Pion -> Lui, c’est mon premier long. Je vous l’ai pas présenté, ne le considérant pas digne.
Cavalier -> Mon deuxième long, Malastros. Outch ! Deux cases ! C’est le prix du cavalier seul.

Fou -> Les reliques de Dieva prendront la diagonale sur trois cases... 

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Depuis le début, vous n’avez pas joué dans ma direction… Si l’on se fie aux stats youtube de Malastros, seul un dixième d’entre vous ont regardé en moyenne cinq minutes. La première scène (la pire) est-elle suffisante pour juger d'un film entier ? Je ne vous félicite pas pour le pic de vues, lorsque mes actrices sont en petites tenues ! Ainsi, par un jeu de déresponsabilisations, de confiance aveugle envers les canaux usuels, vous pénalisez directement ma prochaine équipe, les privant de salaires. Vous pénalisez la prochaine création, contraignant l’écriture à l’accessible de ma seule force de travail. Vous pénalisez mon assiette, car plusieurs années sans salaires, paupérise. La logique veut que vous défendiez vos créateurs locaux, aussi amateurs soient-ils, car ils sont les seuls à pouvoir renouveler le sang du cinéma, attirer le jeune public. Si les cinéastes basculent sur internet, quel sera le taux de survies des salles ? Aïe ! Netflix tente de saboter la tour de la chronologie des médias au festival de Cannes. La question est urgemment sérieuse… 

Dorian Clair | 2017

Le Covid permet à Netflix de mettre échec au Roi.

Pion -> Avancées en communication.

La situation est critique : si votre dame tombe, il n'y aura plus aucuns moyens de vous protéger.

La VR arrive, l'investissement dans des projecteurs et serveurs Doremi ne sont plus d'actualité.

Vous devez accepter la nouvelle génération : avec une grande quantité de films gracieusement offerts sur une période déterminée, nous pourrons perfuser les salles et vous maintenir en vie.

Sinon, il vous reste la reconversion dans l'éducation, par la transformation des amphithéâtres en salles de classe.

Je vous incite à provoquer la désobéissance civile, en forçant l'ouverture des salles avec des films locaux de rang 2-3 pour réattirer le public, sans risquer les films porteurs. En gros, attirez les gilets jaunes gauchistes dans vos cinémas pour qu'il participent à un acte de résistance culturel. Voilà une colère mieux dirigée, qui trouvera son apaisement avec la réouverture officielle. 

2021

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